La Fabrique Culturelle

L’humour en littérature autochtone

Le Cabaret du Trickster: caustique et salutaire

Tout le monde rit. Mais tout le monde ne rit pas pour les mêmes motifs. 

Selon l’ethnologue Isabelle Picard, de la nation huronne-wendat, les peuples et communautés autochtones utilisent abondamment l’humour caustique, l’ironie et le sarcasme dans leurs littératures orales et écrites à des fins utilitaires: pour mettre un baume sur leurs blessures traumatiques de même que pour évacuer le stress et ainsi rendre leur vie plus légère. Pour eux, la blague permet de normaliser ce qui ne peut pas l'être. 

Ils se tournent également vers l’autodérision pour se moquer de leurs propres travers et donner quelques leçons à leurs pairs. «Au lieu de se mettre à rire de ceux qui vivent à côté et qui les font souffrir, ils ont le réflexe d’abord de regarder leur propre communauté. En parlant à leur communauté, ils parlent aussi des autres», précise l’acteur et auteur natif de la réserve huronne-wendat Jocelyn Sioui.  

Le Cabaret du Trickster en est un exemple concret. Mis en œuvre  par la Librairie Hannenorak, à Wendake, et présenté dernièrement au Théâtre Aux Écuries, à Montréal, ce spectacle a mélangé des prestations musicales et la lecture d’extraits d’ouvrages autochtones à saveur humoristique, dont On pleure pas au bingo, de Dawn Dumont, et Le baiser de Nanabush, de Drew Hayden Taylor. Par la bande, il a fait honneur au trickster, un personnage mythique chez les Autochtones qui joue des tours en se métamorphosant à volonté et en apparaissant là où personne ne s’y attend. 

Parmi les autres modèles littéraires inspirants, Jocelyn Sioui a analysé avec humour comment s’écrit l’Histoire (ou comment elle ne s’écrit pas) dans son roman Mononk Jules. Thomas King a, quant à lui, étudié avec un esprit sagace et désopilant les liens complexes entre les Autochtones et non-Autochtones dans son essai L’Indien malcommode: un portrait inattendu des Autochtones d’Amérique du Nord

À plus grande échelle, les Éditions Hannenorak — la seule maison d’édition agréée spécialisée dans la publication d’œuvres autochtones au Québec — ainsi que le mouvement Je lis autochtone n’ont jamais cessé de faire rayonner le talent créatif et comique des Premières Nations, des Inuit et des Métis. 

Ainsi, qu’il soit célébré sur scène ou couché sur papier, l’humour chez les peuples autochtones est un précieux outil de cohésion sociale et d’ouverture à l’autre. Il permet «une véritable rencontre entre un lecteur [ou spectateur] et un auteur; celle que l’on recherche; celle qui laisse des traces», déclarait récemment Isabelle Picard dans un carnet thématique sur les littératures autochtones du réseau Les libraires.  

Pour découvrir d’autres ouvrages autochtones (à saveur humoristique), rendez-vous du 17 au 20 novembre au Salon du livre des Premières Nations, à Québec. 

Crédits

Télé-Québec Montréal-Laval       

Caméraman-monteur-réalisateur: Thibaud Nicoloff     
Caméraman: Louis-Philippe Chagnon      
Coordinatrice régionale: Isabelle Longtin    
Techniciennes en production: Annabelle Jenneau-Younès et Noémie Lacoste    
Rédactrice: Édith Vallières